Lycée du Haut-Barr

- 67700 Saverne -

LUNDI 10 DECEMBRE 2018
 
Ils arrivent ! A 23h, nos correspondant·e·s catalan·e·s descendent du bus devant le lycée du Haut-Barr, après un voyage de 1200 kilomètres en avion et en car. 
¡ BIENVENIDOS !
Quelle joie de retrouver les professeur·e·s et leurs élèves ! Huit jeunes espagnol·e·s faisaient déjà partie de l’échange l’an dernier ; ils sont ravis de revenir à Saverne. « ¡ Mi hermano ! » s’écrie Charles, en serrant dans ses bras Arnaù. 
Les familles alsaciennes accueillent chaleureusement les correspondants ; quelques élèves français·e·s qui débutent l’espagnol en 2de appréhendent un peu de devoir parler dans cette langue, mais la plupart des Catalan·e·s maîtrisent le français, et quand ce n’est pas le cas, chacun·e supplée aux paroles par des gestes, des expressions de visage…
 
MARDI 11 DECEMBRE 2018
 
En route pour le Parlement de Strasbourg !
Nos élèves français·e·s n’auront jamais entendu autant d’espagnol ! Une médiatrice présente les institutions européennes, l’Histoire de la construction européenne et les états membres, avant de laisser la parole au député catalan José Maria Terricabras. Quelle verve ! Quel charisme ! Même si cet homme s’exprime exclusivement en catalan, nous parvenons à comprendre une partie de ses propos, grâce à ses gestes et ses expressions théâtrales. Les jeunes de Manresa sont captivé·e·s.
Aussitôt après, nous avons la chance d’assister à une séance plénière du Parlement : munis de casques qui nous transmettent en direct les traductions en différentes langues, nous écoutons les débats sur les gilets jaunes et autres sujets d’actualité, mais il est temps de partir quand les député·e·s commencent à affluer pour passer aux votes.
Les jeunes ont « quartier libre » pour déjeuner au marché de Noël de Strasbourg, puis les Alsacien·ne·s proposent à leurs ami·e·s Catalan·e·s une visite guidée de la cathédrale et de la Petite France. Comment fonctionne l’église astronomique ? Est-il vrai que cette célèbre église ait abrité le culte protestant, au XVIème siècle ? Pour quelle raison les maisons à colombage sont-elles plus vastes aux étages qu’au rez-de chaussée ? Autant de questions auxquelles les lycéen·ne·s savent désormais répondre. Dès 16h30, nous roulons vers les foyers de Saverne et des environs, où les familles choient leurs invité·e·s.
 
 
MERCREDI 12 DECEMBRE 2018
 
Ce matin, nous entamons un voyage dans le temps, un pèlerinage vers des lieux de mémoire : la gare de Rothau et le centre de concentration du Struthof. Mais auparavant, nous descendons au mémorial de Schirmeck, qui présente une contextualisation de la Shoah. Conçu pour créer des sensations d’oppression, d’enfermement propres au système nazi, l’édifice nous fait entendre les aboiements d’Hitler dans une salle minuscule, avant de nous entasser dans des wagons de trains comme ceux que les Alsacien·ne·s exilé·e·s durent emprunter, ou encore de nous faire gravir des couloirs de plus en plus étroits, à l’image du carcan dictatorial. Une salle longiligne nous change en résistant·e·s, en « collabos » ou en « résigné·e·s », selon notre placement devant le mur blanc, noir, ou sur la ligne grise. Enfin, après avoir franchi sur des passerelles un pan de forêt vosgienne jonché de chars brisés, nous atteignons un espace ouvert, moderne, enthousiasmant, aux couleurs de l’Europe. De vastes fauteuils de bois invitent les visiteuses et les visiteurs à se délasser aux sons d’une musique pleine de promesses : on se prend à croire à l’avenir, en voyant défiler sur un immense miroir des images de fraternité, de prospérité, et surtout de paix, grâce à l’Europe.
Rassérénés par la pause déjeuner, les jeunes reprennent le bus qui les dépose à la gare de Rothau, où devaient descendre les déportés de la seconde guerre mondiale. Comment protester contre la montée sylvestre d’une heure et demie, quand on a le ventre plein, et que l’on songe aux détenu·e·s affamé·e·s qui furent forcé·e·s de gravir la même sente, l’âme en peine, maltraités, séparés de leurs proches, et souffrant au physique comme au moral ? Comment maugréer sous ce riant soleil d’hiver, quand l’on sait que ces malheureuses victimes devaient endurer des températures qui pouvaient descendre jusqu’à moins 20°c, vêtues d’un simple pyjama ? La chambre à gaz s’élève là, comme une réponse austère, qui intime à chacun, à chacune, le respect pour les opprimé·e·s, en même temps qu’une rage de révolte contre leurs oppresseurs. C’est horrible, c’est indigne, c’est dément, à tel point que, même face aux preuves tangibles, aux douches, aux cuves où l’on mettait les cadavres, on a du mal à y croire.
La montée reprend, plus sombre. Nous passons devant la villa où le chef du camp faisait chauffer sa piscine à l’aide du four crématoire, et nous parvenons au camp de concentration. Un brouillard glacé nous enserre, mais là encore, nous nous sentons protégé·e·s par nos vêtements chauds, à des années lumières des déporté·e·s d’autrefois. Les escaliers jadis bâtis par les prisonniers plongent dans une nuée blanchâtre, de blocs en blocs, jusqu’aux fours. Nous repartons en courant vers le bus, vers la vie, vers le présent.
 
JEUDI 13 DECEMBRE 2018
 
Notre retour dans le passé se poursuit par la visite de l’une des « places fortes » de la ligne Maginot : le Fort de Schoenenbourg. Un guide passionné nous fait parcourir, au pas de course, des kilomètres de galeries, à trente mètres sous terre. Il s’arrête un instant pour expliquer tantôt le fonctionnement du petit train de transport des matériaux, tantôt celui des moteurs, des aérations, et surtout des canons. Au fort, les soldats subsistaient dans des conditions très dures; leur couchages n’étaient que des hamacs susendus à des barres métalliques, le long des couloirs. Cependant, cette vaste construction militaire était si efficace que les soldats allemands ne parvinrent jamais à s’en approcher; finalement elle fut cédée à l’Allemagne par le haut commandement français, après l’armistice de 1940.
Sa “carapace de tortue” émerge toujours, le long d’une ligne parsemée de blockaus, de forts et de canons. Nous les guettons depuis les vitres du bus qui nous conduit à présent jusqu’à Baden-Baden, au coeur de la Schwarzwald. Un rallye-photo permet aux jeunes de décourir les principaux monuments de la cité badoise, en particulier les célèbres thermes romains qui attirent, aujourd’hui encore, tant de touristes en villégiature.
 
 
 
VENDREDI 14 DECEMBRE 2018
 
Aujourd’hui, c’est dans leur propre ville que les élèves savernois se muent en guides; ils et elles présentent le château, les églises protestante et catholique, la taverne Katz, la licorne, symbole de la cité, l’écluse... De retour au lycée du Haut-Barr, les jeunes sont accueilli·e·s par le proviseur M.Buttner et son adjoint M.Kinder. Le chef d’établissement adresse à l’ensemble des participant·e·s un chaleureux discours sur l’entente entre les peuples et les enrichissements mutuels dûs aux échanges culturels et linguistiques, puis un buffet déjeunatoire rassemble tout le monde, dans un joyeux partage.
 
 
 
SAMEDI 15 ET DIMANCHE 16 DÉCEMBRE 2018
 
Les correspondant·e·s catalan·e·s passent la fin de la semaine dans leurs familles d’accueil: les un·e·s confectionnent des bredeles, les autres se lancent dans des batailles de boules de neige, ou discutent simplement en “espagno-catalo-anglo-français”. Des liens d’amitié se tissent au fil des expériences communes.
Les jeunes et leurs parents sont convié·e·s à la fête d’adieu qui clôt le séjour des Catalan·e·s: au réfectoire du lycée, chacun se remémore les bons moments de la semaine devant un diaporama de photographies; les élèves reçoivent des prix pour leur implication, leur bonne entente, leur diapo du séjour... L’ambiance monte encore d’un cran lorsque les Catalan·e·s chantent “Que vendra”, suivis des Français qui entonnent “Entre poetas y presos”, un chant revendicatif, repris avec force par nos ami·e·s  catalan·e·s. L’auberge espagnole fonctionne à merveille: tou·te·s les convives se restaurent en bavardant, puis l’on pousse les tables et la danse bat son plein! La tête pleine de souvenirs partagés, les adolescent·e·s se préparent à se quitter dans quelques heures... pour mieux se retrouver dans trois mois!
 
 
LUNDI 17 DECEMBRE 2018: le départ
 
Dès 5h30 tout le monde se retrouve devant le lycée. Il gèle. Engourdis de sommeil, les Catalan·e·s embarquent leurs valises dans la soute du bus, avant de dire un dernier aurevoir à leurs correspondant·e·s. Dans quelques heures nos ami·e·s seront dans le ciel, pour un vol rapide vers Barcelone et Manresa. ¡ Hasta pronto !  ¡ Nos veremos en primavera !
 
 Edwige Laneres et Virginie Marie