Lycée du Haut-Barr

- 67700 Saverne -

René char : « Dans nos ténèbres, il n’y a pas une place pour la Beauté. Toute la place est pour la Beauté ».
Le dernier jour avant les vacances de la Toussaint, donc avant le confinement, trois classes du lycée (les TG1, puis les THLP et les 1HLP) ont pu se rendre au musée du Château des Rohan pour découvrir dans la grande galerie les œuvres exposées du peintre européen  Alfredo Müller. Ces sorties pédagogiques s’effectuent dans le cadre de leur cours de philosophie avec Mme Le Van, accompagnée par ses collègues Isabelle Gourmelon, Edwige Laneres et Nicolas Saint-Eve. L’objectif est de donner aux élèves une culture esthétique pour enrichir leurs réflexions sur l’art et le temps, les expressions de la sensibilité, les séductions de l’art, autant de notions au programme.
Photo N° 1 : Les TG1 accompagnés par leur enseignante de philosophie près de la toile : « Natura morta con maschera », nature morte au masque (thématique d’actualité !)
 
 
Les élèves ont bénéficié d’une séance de sensibilisation aux œuvres du peintre transfrontalier Alfredo Müller en cours de philosophie, au moyen d’un support intitulé : « Variations masquées ».
 
Ils sont donc arrivés au musée avec des repères et certaines idées sur le travail pictural de l’artiste. Néanmoins, la confrontation aux œuvres agit toujours comme une révélation. Fascinés par la finesse des traits, les jeux chromatiques et la variété des genres abordés par le peintre, les élèves ont plongé dans ce monde onirique qui invite poétiquement à des voyages imaginaires. Mme Hélène Koehl, la présidente de l’association des amis d’Alfredo Müller, a eu la générosité de nous offrir trois visites guidées successives, à thème, afin que ses explications correspondent aux notions des programmes en philosophie de chacune des classes. Les élèves ont dû pendant les vacances rédiger une analyse d’œuvre, choisie librement parmi celles exposées.
Photo N° 2 : Mme Koehl présentant les œuvres d’Alfredo Müller aux élèves.
 
 
Sous l’apparence de toiles radieuses se profilent souvent des éléments qui dessinent autant de contrepoints plus angoissants : l’insouciance heureuse d’un couple costumé figurant sur une jarre est menacée par la guerre et ses ravages, dans la toile Natura morta con maschera. 
 
Photo N° 3 : Natura morta con maschera, 1915.
 
 
Figurés sur l’une des Arlequinade du peintre livournais, qui aimait à représenter la commedia dell’arte, Colombine et Arlequin enlacés au clair de lune n’aperçoivent pas Cassandre, le tuteur jaloux armé d’un cimeterre (sabre à lame courbée)… 
 
Photo N° 4 : Au clair de lune, Arlequinade, exposée à partir de 1918.
 
 
Les arts entrent en résonnance ou en correspondance chez ce peintre poète, qui faisait interagir peinture, musique, théâtre, opéra, danse... Alfredo Müller, passionné de gravure et talentueux dans les arts décoratifs, s’emploie notamment à immortaliser l’instant d’un pas de danse, dans sa grâce éphémère, sur sa lithographie représentant Sada Yacco, mais aussi lorsqu’il réalise une eau-forte en aquatinte sur Jane Avril sur la scène du Moulin-Rouge. 
 
Photos N° 5 et N° 6 : Sada Yacco, 1900,  et Jane Avril sur la scène du Moulin-Rouge, 1897.
 
  
 
Le thème du masque est central dans sa recherche artistique, car la question de l’identité entre en résonnance avec sa multi-appartenance culturelle. Ainsi, Arlequin, au costume constitué de nombreux losanges polychromes, devient comme un double de l’artiste. Non sans ironie, l’artiste soutient : « Voici des masques bien élevés qui plaisantent sans arrière-pensées ». Or, cette phrase écrite mi en italien, mi en français, en dit plus qu’il n’y paraît, car le monde de la scène est précisément celui des sous-entendus !
 
Photo N° 7 : Les masques de la commedia dell’arte : le comique et le tragique se côtoient.
 
 
Souhaitons, à l’instar de cet artiste, que nos masques actuels nous invitent à redéfinir bellement nos identités, en les rendant toujours plus ouvertes à l’altérité, aux différences culturelles. Les masques d’Alfredo Müller s’apparentent non à des baillons ou à des barrières, mais à des ponts, à des paysages poétiques, à des vols transfrontaliers de pigeons voyageurs que les élèves ont pu découvrir lors de ces pérégrinations au pays des muses !
 
Claire Le Van