Photo 1 : Une commémoration émouvante devant la Fosse aux cendres. Crédit Photo CERD Aurélie Feix.
Ce vendredi 10 février 2023, les élèves de TG1 et THLP du lycée du Haut-Barr, ont bénéficié d’une journée mémorielle au camp du Struthof grâce au projet UNESCO « Persécutions et Résistances », porté par la référente UNESCO Mme Claire Le Van, soutenue par ses collègues Mme Laura Cousandier, Mme Jana Wegner, Mme Laetitia Walther et M. Thibaud Kueny, en collaboration avec la Société des Membres de la Légion d’Honneur (SMLH) comité d’Alsace du Nord, représentée ce jour-là par M. Roland Sinteff, officier supérieur de gendarmerie (re), avec les Archives d’Alsace, et le Ministère des Armées (culture et mémoire).
I. Les persécutions subies par les Malgré-Nous, et les détenus du Struthof, expliquées aux lycéens.
Les élèves ont eu la chance d’être accompagnés par M. Bernard Linder, vice-président du Souvenir français, section Saverne-Bouxwiller, très actif dans le cadre de l’association des « Malgré-Nous d’Alsace-Moselle », qui les a sensibilisés à la douloureuse problématique des Incorporés de Force lors d’une brillante conférence dans le bus.
Photo 2 : Présentation de M. Linder qui a eu la générosité de nous offrir une conférence dans le bus.
A. Lien vers la conférence de M. Bernard Linder.
Photo 3 : M. Linder évoque les disparus du Bas-Rhin.
Puis nous sommes arrivés au site du Struthof, où le temps était glacial, mais adouci par un soleil très lumineux, ce qui créait un effet de contraste à l’image de ce lieu terrible : une nature fort belle, et les restes d’un camp de détention sordide propre au système criminel nazi.
Photo 4 : Photo de groupe avant l’entrée dans le camp.
Nous avons été accueillis par une guide qui nous a tout d’abord fait des rappels historiques du contexte dans lequel le camp a été mis en place, puis nous a montré la Kommandatur.
Photo 5 : Une vue latérale sur le camp du Struthof.
Photo 6 : Détail indécent : la Kommandatur, juste à côté du lieu où les détenus étaient incarcérés dans des conditions inhumaines, possédait une piscine pour la famille et le directeur du camp.
Photo 7 : Devant l’entrée du camp.
Nous avons ensuite franchi le portail d’entrée.
Photo 8 : Double rangée de barbelés pour entrer dans un lieu inhumain.
Photo 9 : Les élèves ont ensuite effectué un parcours dans le camp, proposé par une guide remarquable, Mme Justine Leindecker.
Elle leur a donné des explications sur les terribles conditions de vie des détenus. Elle a précisé qu’un appel se faisait tous les matins, dès 4h du matin, qui durait en moyenne d’une à deux heure(s), mais qui a duré une fois jusqu’à 6 heures consécutives, dans le froid glacial de l’hiver, où il fallait compter et recompter les prisonniers devant se tenir immobiles, sous peine de sanctions, voire de mise à mort. Les plus épuisés ne résistaient pas à cette épreuve.
Photo 10 : La potence, située juste à côté de la place d’appel pour dissuader tous ceux qui voudraient s’échapper, se rebeller ou résister, rappelle combien le lieu est sinistre.
La guide évoque les rations alimentaires extrêmement réduites et les tenues pas assez chaudes, notamment les chaussures ouvertes et mal adaptées à la pointure des détenus, ce qui les acculaient à souffrir cruellement de la faim, de la soif, et du froid, sans parler des tâches harassantes qui leur étaient confiées, souvent absurdes ou cyniques, en précisant que les marches d’escalier du camp, situé volontairement en pente sur un versant particulièrement froid, avaient été exprès créées de manière irrégulière et trop hautes, pour accroître la fatigue des détenus déjà épuisés par ailleurs. C’est un camp où tout est pensé pour déshumaniser et réduire à néant les individus, surtout les fameux détenus « Nacht und Nebel » qui devaient disparaître dans « la Nuit et le Brouillard », sans traces.
Photo 11 : Les élèves descendent le long d’une rampe aménagée, qui se situe entre les lieux des baraques (détruites par le feu pour des raisons de sécurité) et les barbelés avec miradors, pour se rendre vers le bas du camp.
Dans chaque baraque, il pouvait y avoir jusqu’à 600 détenus, alors qu’elles étaient prévues initialement pour 300 personnes. La promiscuité a accru les transmissions de maladies, de parasites, et des violences entre détenus n’ayant pas assez de place pour dormir correctement dans les châlits. La guide a précisé que l’hygiène y était déplorable, et que des Kapos, issus du droit commun, régentaient les baraques avec violence, et bénéficiaient de ce fait de conditions légèrement plus favorables. Parfois, l’un ou l’autre Kapo était assassiné la nuit par les détenus qui les détestaient, mais les nazis ne s’en souciaient guère, car c’étaient des détenus dont ils souhaitaient de toutes les façons se débarrasser, et il était par ailleurs toujours possible de le remplacer du fait qu’il bénéficiait d’une ration alimentaire un peu plus conséquente, l’offre était alléchante au sens premier du terme.
Photo 12 : Les cuisines, situées en haut du camp (avec le mémorial national aux héros et martyrs de la déportation) : ainsi, les jerricanes de soupe n’arrivaient pas toujours jusqu’aux prisons situées en contre-bas, car les détenus fatigués perdaient l’équilibre en chemin, faisant tomber le liquide infâme qui n’avait d’ailleurs de soupe que le nom, mais qui restait néanmoins vital pour survivre.
Même dans l’enfer, il existe une gradation de l’horreur : des lieux où se sont pratiqués des abjections inimaginables se situent en contrebas du camp, à savoir les prisons, les salles d’expérimentation et le four crématoire. Les fenêtres des prisons sont situées en hauteur pour que les détenus ne puissent pas avoir de vue vers l’extérieur, et à titre de punition, il arrivait que les nazis ferment les volets pour les priver de lumière. Dans des cellules exiguës, ils pouvaient être entassés jusqu’à 15 personnes, ce qui ne leur permettait de s’allonger qu’à tour de rôle.
Photo 13 : les élèves devant les prisons.
Photo 14 et 15 : Les cages dans les prisons où les détenus ne pouvaient pas même tenir debout, enfermés pendant plusieurs jours sans nourriture, ni eau, avant d’être pendus.
Photo 16 : La table d’interrogatoire où les détenus étaient torturés en étant roués de coups. Parfois, les nazis poussaient la perversion jusqu’à faire infliger les brimades par un co-détenu.
Il s’agissait de procéder à des expérimentations ou assassinats pour conserver des prototypes de Juifs, car dans la folie nazie, la « Judenvernichtung » devait aboutir à une purification pour rendre le Reich « Judenrein », dès lors, le Docteur Hirt voulait conserver des collections anatomiques de ces « Untermenschen », à titre d’échantillons. La Faculté de médecine du Reich à Strasbourg a participé à ces sordides activités pseudo-scientifiques, mortifères et racistes.
Photo 17 : la table de dissection, avec des rainures prévues pour laisser le sang des victimes s’écouler. Les détenus, notamment Juifs, étaient considérés comme des bêtes de laboratoire.
Les cendres humaines qui sortaient du four crématoire étaient mélangées et déposées dans la fosse aux cendres. Si les familles en faisaient la demande, elles recevaient moyennant finances une urne avec ces cendres mêlées, mais officiellement contenant seulement les cendres de leur proche. Le cynisme jusqu’au bout, sans aucun respect.
Photo 18 : Le four crématoire, vestige d’une barbarie planifiée.
Photo 19 : La cheminée du crématoire d’où sortait une odeur âcre de chair brûlée.
Le four crématoire alimentait une chaudière permettant aux détenus nouvellement arrivés de bénéficier d’une douche « chaude », chauffée au moyen de corps humains brûlés. Bien entendu, une fois que les détenus exténués par le trajet vers le camp avaient pris du plaisir à pouvoir enfin se laver à l’eau chaude, on leur révélait le moyen utilisé pour chauffer l’eau : le sadisme à l’état pur.
Photo 20 : Les douches où l’eau est chauffée au moyen de corps humains brûlés.
Les jeunes ont été secoués face à tant de vestiges concrets de la brutalité nazie (notamment, la potence, les cellules exiguës, la table de torture, la table des expérimentations, le four crématoire, le lieu des « douches chaudes »…).
II. Une cérémonie en hommage aux victimes a été organisée lors ce parcours mémoriel.
Photo 21 : La fosse aux cendres où nous nous recueillons en hommage aux détenus assassinés. Crédit Photo CERD Aurélie Feix.
Le directeur du site, M. Guillaume D’Andlau, a prononcé un discours fort lumineux rappelant aux jeunes que les tragédies de l’histoire reviennent si l’on ne garde pas en mémoire les sacrifices, souvent héroïques, de tant de personnes persécutées par un système politique oppressif. M. d’Andlau a insisté sur la liberté de choix des individus.
Photo 22 : Des élèves porte-drapeaux : Pierre Winstein, Lili-Rose Humbert, Jacem Filali. Crédit Photo CERD Aurélie Feix.
Le chant des marais, le chant des partisans puis la Marseillaise, ont été entonnés par les lycéens et par leurs accompagnateurs devant la fosse aux cendres.
Photo 23 : Des chants à forte portée symbolique : un moment très fort en émotion. Crédit Photo CERD Aurélie Feix.
Photo 24 : Deux élèves, Camille Kasprowitz et Nathan Ludwig, ont déposé une gerbe de fleurs en contrebas de la fosse, près des plaques mémorielles. Crédit Photo CERD Aurélie Feix.
Photos 25 et 26 : Une gerbe en hommage portée par le lycée du Haut-Barr (UNESCO) et la SMLH (comité Alsace du Nord). Crédit Photo CERD Aurélie Feix.
Le froid glacial de cette journée, à l’image de l’inhumanité des lieux, entrait en contraste avec le soleil resplendissant qui a éclairé cette cérémonie d’une grande espérance : des valeurs citoyennes solides ont été transmises aux jeunes.
Photo 27 : le groupe à la fin de la cérémonie.
III. Un atelier stimulant sur « le langage totalitaire ».
Après avoir rapidement découvert l’exposition « Exploitations multiples » La faculté de médecine de la Reichsuniversität Strassburg et le KL-Natzweiler (1941-1944) », nous avons déjeuné grâce à un repas tiré du sac, au chaud dans l’espace dédié à cet effet. Notre guide nous a ensuite conviés dans la salle pédagogique pour un atelier sur l’œuvre de Victor Klemperer (1881-1960) intitulée : LTI (Lingua Tertii Imperii – La langue du troisième Reich). Elle nous a tout d’abord sensibilisé à des termes en apparence anodins, puis a donné des consignes de travail.
Photo 28 : Notre guide lors de l’ouverture de l’atelier sur la langue du IIIème Reich.
Elle a demandé aux élèves de se répartir en plusieurs groupes qui ont chacun bénéficié de deux affiches réalisées par l’artiste Edouard Steegmann qu’ils devaient commenter, puis ils devaient établir des liens entre ces images et des extraits de l’œuvre de Klemperer qui leur ont été distribués.
Photo 29 : Nos deux invités, M. Linder et M. Sinteff, ont aidé les élèves lors de la mise en commun des idées.
Après avoir pris un temps de concertation entre eux, les élèves ont procédé à une restitution devant leurs camarades. Tous les groupes ont réussi l’exercice avec brio : félicitations à tous les élèves !
Photo 30 : Groupe 1 – Jacem Filali, Adalric Ottwiller, Pierre Winstein.
Photo 31 : Groupe 2 – Loïs Weibel, Pierre Finance-Martinez, Aymeric L’Hôtellier, Thomas Rasser, Camille Kasprowitz.
Photo 32 : Groupe 3 – Mélanie Landwerlin, Jules Meulman-Picot, Ella Vogler, Romane Oliger, Manon Mecker.
Photo 33 : Groupe 4 – Nicolas Schmitt, Nathan Ludwig, Emma Decreus, Tiffany Brossard.
Photo 34 : Groupe 5 – Hugo Mazurier, Eliott Borkowski, Clément Desmonts, Baptiste Gross, Auriane Heitz, Joad Oster.
Photo 35 : Groupe 6 – Lili-Rose Humbert, Satine Gehringer, Melek Dag, Betül Yalcin, Chloé Adam.
Photo 36 : Les enseignantes, de gauche à droite : Mme Laetitia Walther, Mme Claire Le Van, Mme Laura Cousandier, Mme Jana Wegner.
IV. La chambre à gaz située à 10 minutes du camp près de l’auberge du Struthof.
Avant de repartir, nous avons, sur les conseils de notre guide, pris la route vers la chambre à gaz du Struthof, qui a aussi servi de laboratoire pour des expérimentations à partir de 1943. Les lieux nous ont glacé, la chambre à gaz étant le sommet de l’ignominie nazie. Rappelons qu’une chambre à gaz est un dispositif destiné à donner la mort, consistant en une pièce hermétiquement close dans laquelle un gaz toxique ou asphyxiant est introduit. Elles font partie du programme génocidaire des nazis.
Photo 37 : La chambre à gaz près de l’Auberge du Struthof, sinistrement banale de l’extérieur.
Photo 38 : La chambre à gaz, invention sinistre. Le gaz était produit par de l’eau qui était versée à l’aide d’un entonnoir sur des pastilles qui dégageaient un gaz mortel, le phosgène.
Photo 39 : Le groupe devant ce lieu emblématique de la folie persécutoire nazie.
V. Des explications sur le Souvenir français par Bernard Linder lors du voyage de retour.
Photo 40 : M. Linder nous explique ce qu’est le Souvenir français et l’importance de ses actions.
B. Lien vers les explications du conférencier sur le Souvenir Français.
Merci à toutes et à tous ceux qui ont rendu ce parcours mémoriel possible, en particulier notre direction et tous les collègues qui se sont impliqués ! Merci à M. Bernard Linder pour sa générosité et son dévouement pour nous partager des connaissances sur les Malgré-nous et le Souvenir français, merci à M. Roland Sinteff de la SMLH pour la constance et la solidité de son engagement humaniste ! Merci au directeur du site, M. Guillaume D’Andlau, pour son accueil si bienveillant et son discours empli de clartés. Merci à Mme Marie-Laure Jundt, présidente de la SMLH d’Alsace du Nord, pour la gerbe. Merci à notre guide Justine Leindecker et à ses collègues. Merci aux élèves qui ont participé d’une façon exemplaire tant au parcours, qu’à la cérémonie puis à l’atelier.
Claire Le Van
Article DNA du 23.02.23 :
Article de L’Ami Hebdo du 05. 02. 2023 : « Au Struthof, la chambre à gaz réhabilitée ».